Une grève…mais pas d’entraves!

Une grève, celle dont rêve tout bon Sarkozyste considérant les grévistes comme des fainéants opposés au principe du travailler plus pour gagner plus, se déroule depuis le 24 décembre dans notre pays, celle des médecins urgentistes aujourd’hui rejoints par les anesthésistes.

Mais curieusement, comme aucun « usager » (*) des hôpitaux n’en ressent le moindre effet (**), non seulement tout le monde s’en fout et ces grévistes subissent une indifférence pesante, mais en outre doivent supporter le mépris du ministère de tutelle s’amusant à colporter de faux chiffres de grévistes pour mieux discréditer le fort mouvement de grogne.

C’est ce que rapporte le très médiatique Patrick Pelloux (qui compare brillament les comptes épargne temps aux emprunts russes), celui qui avait pris conscience le premier du désastre de la canicule de 2003, et que visiblement l’on n’écoute pas plus en 2008 qu’il y a 5 ans.

Au delà des motifs de revendications qui semblent formidablement justifiés quand on sait à quel point l’hôpital public manque de moyen et prends ses fonctionnaires, spécialistes du travailler plus pour gagner moins, pour des zozos en leur proposant le rachat de leurs RTT et des heures supplémentaires comme avenir dans un flou judicieusement entretenu, je voudrais insister à travers cette grève sur l’impérieuse nécessité d’avoir un rapport de force visible, médiatique et économiquement pénalisant pour pouvoir se faire entendre.

La manipulation très libérale qui consiste à faire rêver d’une France qualifiée de mature où les conflits et désaccords seraient tués dans l’œuf par la négociation entre gens de bonne société, plutôt que par un affrontement stigmatisé d’archaïque avec des malotrus grévistes recherchant le conflit pour le conflit est non seulement un énorme mensonge mais surtout un leurre.

Ce qui manque de plus en plus à la France, c’est justement de fortes et nombreuses (***) grèves, pénalisantes, qui permettent enfin de rééquilibrer le rapport capital travail.

Toute l’action libérale consiste au contraire à empêcher la grève par stratégie calculée ou par dénigrement, à la restreindre par exemple par la loi de service minimum applicable depuis le 1er janvier 2008 et finalement à faire passer le gréviste au mieux pour un inconscient inapte au dialogue, au pire pour un fainéant dont le privilège serait celui de pouvoir faire grève.

Si les urgentistes rament pour obtenir leur du, c’est parce qu’il sont inaudibles.

Si les cheminots se sont fait roulé dans la farine par rapport à leurs premières revendications, c’est parce que leurs représentants annonçaient qu’ils étaient prêts à négocier alors même que la grève n’avait pas commencé.

Si les marins ont obtenus ce qu’il voulaient, c’est parce qu’il ont tout bloqué de façon radicale.

Privilégier la négociation à la grève alors que cela fait des mois, voire des années, que le rapport de force de l’actionnariat s’impose en silence au salariat, c’est vouloir tuer toute idée que les rapports de force ne doivent pas exister, ou au mieux de façon mesurée, alors même que le capitalisme est construit sur des rapports de force, le premier étant la force de travail louée au patronat dans un lien de subordination juridique dénommé « contrat de travail« .

Toute la société nous pousse à être performant coûte que coûte, prône la compétitivité comme source de progrès, et l’on viendrait nous expliquer ensuite qu’il n’est pas raisonnable d’exiger par la grève ce que le salariat n’obtient pas naturellement dans un système déséquilibré que seule une forte action et volonté publique parviendrait péniblement à tenter d’équilibrer ?

Nous vivons dans un système qui n’est pas Wonder world, quand bien même on veuille nous raconter un conte de noël par jour. La lutte des classes existe plus que jamais, elle se déroule devant nos yeux lorsque Sarkozy fait des cadeaux aux plus riches pendant qu’il nous explique que la France ne peut plus se permettre d’augmenter le pouvoir d’achat des salariés autrement qu’en travaillant plus !

Voilà pourquoi ce moyen de lutte radicale qu’est la grève est essentiel. Elle doit se mener frontalement, être gênante pour le bon fonctionnement du pays, pour contraindre le gouvernement libéral à ce qu’une véritable négociation aboutisse au cours de la grève par l’annonce de mesures immédiates.

J’engage toutes les corporations à ne pas l’oublier, quand bien même ceux, de droite comme de gauche, qui se référent au droit de grève, sont les premiers à le bafouer en tentant de discréditer son principe.

Je conseille donc aux urgentistes et autres anesthésistes, malgré les conséquences, de ne plus répondre systématiquement favorablement à toutes les demandes de réquisition…

(*)  terme pour une fois propre à sa destination puisqu’il s’agit bien de médecins travaillant dans un service public au service des usagers, contrairement aux faux usagers dénommés ainsi par les médias au moment de la grève de cheminots, qui n’étaient en réalité que des clients des entreprises de transports privées.

(**)  ceci en raison des réquisitions opérées sur ces corps de métier pour des raisons facilement compréhensibles, et qui font que les déclarés grévistes travaillent comme si de rien n’était.

(***) le second graphique du lien est plus que parlant. Curieusement il coïncide avec le déséquilibre du partage de la richesse en faveur du capital. En clair, moins on se manifeste, moins on bloque, moins on obtient ! 

Publié dans : politique |le 3 janvier, 2008 |9 Commentaires »

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9 Commentaires Commenter.

  1. le 3 janvier 2008 à 16:48 Nico2312 écrit:

    @ Enzo
    plutôt que polémiquer sur la grève, la négo et l’obtention de résultats (on aura bien le temps de le faire durant cette année que je te souhaite bonne !!! :-) ))), juste un petit coup de pub pour un article du Monde d’hier ou avant hier qui expliquer pourquoi la loi sur le service minimum est inapplicable et n’est que de l’esbroufe…
    http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0,36-995256,0.html

    au passage tout a fait d’accord avec toi sur les urgentistes surtout quand on sait que les généralistes de garde ont obtenus une forte hausse de leurs (grasses) indemnités :-( ((

  2. le 3 janvier 2008 à 16:57 enzo d'aviolo écrit:

    @Nico
    de l’esbrouffe surement, car c’est un combat majeur qui se joue et il n’est pas facile d’affirmer vouloir supprimer le droit de grève, car c’est de cela dont il s’agit!
    mais petit à petit l’oiseau libéral fait son nid en nous expliquant en quoi la grève est inutile et archaïque, elle qui est pourtant si peu usité en France (comme je l’indique dans le billet), en mettant en avant la sauteuse dénommée « négociation ».
    Ce terme dans les bouches libérales perd tout son sens réel et utile. Il masque ce que je dénonce.

    sur ton dernier point, là tu mets en avant l’un des moyens libéral pour discréditer une grève, celui de diviser pour mieux régner! un classique!

  3. le 3 janvier 2008 à 17:02 Nico2312 écrit:

    @ Enzo
    sur le dernier point, il ne faut pas non oublier le clientelisme : les généralistes, réputés voter à droite, sont la population dont les revenus ont le plus augmentés depuis 5 ans… :-( ((
    et une garde de généralistes est autrement moins contraignante et mieux payée que celle d’un urgentiste…

  4. le 3 janvier 2008 à 18:06 un chouka écrit:

    ça, c’est tres clair !
    Et lorsque l’europe(le traité forcené,cloturera ses frontières )toutes les mains d’oeuvre qui manquent ici seront puisées dans les pays membres ,pour éfondrer encore plus les salaires :-> ?
    Pour les urgences, ils n’ont qu’a aller en Asie, les prix et l’acueil sont supèr pèrforment?
    En cas d’urgence, je crois que le mieux c’est d’utiliser les signeaux de fummée pour apeler a l’aide :->?
    Ce système financier, fait’il déplacer le fric ayeur dans les pardis :->?
    Etc…………..:-(

  5. le 3 janvier 2008 à 20:56 enzo d'aviolo écrit:

    @Nico
    on est d’accord. Mais pour autant je ne veux pas opposer les deux, car c’est exactement ce que recherche un bon libéral comme Sarko!
    mais qu’il serve d’abord son électorat, c’est pas nouveau, depuis le bouclier fiscal, on a appris à s’en rendre compte… :(

    @un chouka
    si on en devient contraint au système de fumée, là c’est que ce sera mort! o;)

  6. le 4 janvier 2008 à 7:50 Nico2312 écrit:

    @ enzo
    sympa de m’appeler enzo :-) ))

    j’ai du mal à ne pas faire de distinction entre des privilégiés, des vrais, et les urgentistes et les médecins étrangers (tiens encore un scandale…)

    ce qui me permet de revenir, en partie, au coeur de ton post : si les marins pécheurs ont eu gain de cause ce n’est pas tant du faire de leur grève (qui ne touchait d’ailleurs pas tous les ports), mais bien parce qu’ils sont sensés voter traditionnellement à droite… contrairement aux cheminots et autres régimes spéciaux
    je ne dis pas que c’est la seule raison, mais je pense honnêtement que cela à joué très fortement

  7. le 4 janvier 2008 à 8:35 enzo d'aviolo écrit:

    @Nico
    oups corrigé :)

    Sur les marins, d’accord avec toi, je pense qu’il y a un peu des deux raisons:
    - la satisfaction d’un électorat naturel
    - la peur d’un mouvement qui s’étende et de façon radicale!

    ce qui est sur, c’est que s’ils avaient souhaité négocier sans rapport de force, il ne se serait rien passé!

    mais je reviens sur un point qui me semble essentiel, c’est celui de la baisse constante du nombre de jour de grève en France depuis 30 ans qui coïncide curieusement avec la diminution du pouvoir d’achat des salariés et surtout avec la répartition de la richesse produite en défaveur du salariat depuis 30 ans.

  8. le 4 janvier 2008 à 9:26 Nico2312 écrit:

    @ Enzo

    sur la baisse du nombre de jours de grève, j’y vois pour ma part des relations sociales apaisées ou en voie de l’être
    certains progrès sociaux d’importance, comme les 35 heures (n’en déplaise à la droite) se sont passées sans heurts ni grève par exemple
    sans compter que la négo avant grève, qui devient l’ultime recours, aboutit aussi des résultats favorables aux salariés…
    mais j’ai peur qu’on ne soit pas d’accord la dessus :-) ))

  9. le 4 janvier 2008 à 10:20 enzo d'aviolo écrit:

    @Nico
    « sur la baisse du nombre de jours de grève, j’y vois pour ma part des relations sociales apaisées ou en voie de l’être »

    j’espère que c’est une plaisanterie!
    des tensions sociales apaisées alors que les pauvres sont de plus en plus nombreux au point d’y avoir intégré des travailleurs pauvres, alors que les disparités sont de plus ne plus grandes, que la précarité au travail est de plus en plus fortes!
    allons, reprends toi Nico!

    quant aux 35 heures, bah forcément qu’il n’y a pas eu de grève! quand c’est dans l’intérêt des salariés, forcément qu’ils ne vont pas faire grève… :)

    Si tu regardes les pays européens où le nombre de jours de grèves sont les plus élevés, ce sont aussi les pays que l’on prends souvent en exemple pour vanter leurs relations sociales! curieux non?

    la réalité, c’est qu’il devient de plus en plus difficile de faire grève, que la culpabilisation médiatique notamment est en marche et qu’en conséquence le rapport de force s’est largement inversé en faveur du patronat!

    non franchement, si tu voulais être polémiste, c’est réussi là, mais si tu voulais convaincre, je ne crois pas être le seul à ne pas l’être!

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